Russie – Ukraine …
Article écrit en quelques heures, en réaction notamment à cet article de la revue normalienne multilingue “le grand continent”.
Dès le début de cet article, j’ai été interpellé par la malhonnêteté intellectuelle de cette phrase : « Il peut paraître présomptueux au premier jour d’une guerre d’en prédire l’issue, et contre-intuitif – ou optimiste – d’envisager que celle-ci ne soit pas favorable au plus puissant des deux belligérants. ».
Le ton est donné. Alors qu’il apparaît plus qu’évident, que la Russie de Poutine avait déjà perdu la guerre de la communication, tant elle représentait déjà le camp du mal, de la dictature et de la mort avant même le début de ce nouvel épisode. Dans ce monde du manichéisme permanent, le camp du mal VS le camp du bien. C’est donc sur un postulat de départ extrêmement facile, populaire et sans danger, que commence l’article.
S’en suit la mise en avant de « L’extraordinaire combativité des Ukrainens », or personnes ne sait comment ça se passe, mais ce normalien loue d’office l’intégrité des soldats ukrainiens (oui, dans cette phrase ce n’est pas seulement leurs facultés militaires qui sont mises en avant, mais bien un dévouement et un sens du devoir et du sacrifice supposément exceptionnel, qui tranche avec le camp adverse).
Néanmoins il souligne quand même que l’Ukraine est appuyée largement par l’OTAN (« alimentés en armes par au moins 28 pays »), sans toutefois citer l’OTAN et plus généralement l’alliance Pro USA, représentée par l’axe Americano Européen Biden – Trudeau – Macron.
Ensuite, je remarque une énorme contradiction ! La puissance Russe est inarrêtable et pourrait même pratiquer une Blitzkrieg (qui démontrerait d’ailleurs à quel point Poutine incarne le diable en personne et serait donc du pain béni dans cette narrative de condamnation mondiale univoque), mais il n’en est rien. Elle patine et peinerait à se frayer un chemin dans ce petit pays défendu de haute lutte par les vaillants soldats bleus et jaunes, et ce à cause d’objections morales des forces Russes, qui ne seraient pas convaincues du bien fondé d’une telle attaque, ce qui ralentirait leur progression et impacterait leur force de frappe … Ce parti pris de l’auteur (puisqu’il émet ici une hypothèse censée expliquer cette « lenteur ») me paraît grotesque et révèle en tout cas un côté « partisan du bien » qui me dérange. Comme si l’opinion dominante occidentale (qui est la sienne et celle qui défend tout au long de cet article) était tellement juste et fondée, qu’elle se répandrait même dans le camps adverse, comme une prise de conscience.
En revanche, Poutine a toujours dit vouloir épargner le peuple ukrainien (et russe puisque une partie non négligeable des résidents le sont ou s’en revendique, surtout à l’Est du pays) et a toujours bien distinguer le pouvoir, du peuple. Point d’orgue de ce distinguo, lorsqu’il a appelé l’armée Ukrainienne à renverser le pouvoir en place, afin d’opérer des négociations portant essentiellement sur le statut des provinces sécessionnistes et la démilitarisation du pays (militarisation soutenue par les USA et plusieurs pays européens depuis 2014). Et aussi, bien sûr, instaurer un gouvernement pro-russe en Ukraine. Un pouvoir aujourd’hui acquis aux Etats-Unis (de longue lutte puisque “la révolution orange” de 2004 soutenue par les USA, en vue d’instaurer un gouvernement en leur faveur avait échouée).
Négociations rendues impossibles du point de vu Russe, tant le pouvoir Ukrainien est gangrené par les intérêts privés (dont ceux de Hunter Biden) et très internationalisés.
Cette ambition de coup d’état par Poutine, est vendue comme une manière pour le peuple Ukrainien de reprendre en main son destin, ainsi que son indépendance. Sa souveraineté étant menacée par ces intérêts politico économiques, entre le fait de tirer profit d’une terre extrêmement fertile (pas seulement en minerais et en énergies fossiles, mais aussi en terres agricoles) et de pouvoir jouir d’une situation géographique extrêmement stratégique entre l’UE, les Balkans et la Russie, qui en fait un poste militaire avancé de premier plan et un pied à terre diplomatique extraordinaire.
Pour l’instant, il n’y a pas eu de volonté claire d’occuper le pays et de le refaire passer sous drapeau Russe afin de reprendre une logique impérialiste et étendre le territoire de la mère patrie (une volonté souvent attribuée à Vladimir Poutine, et qui est selon moi infondée). Je ne suis pas dupe, comme je l’ai écrit précédemment, le président Russe veut surtout instaurer un régime en sa faveur, dans un pays de transit extrêmement stratégique.
Jusqu’à maintenant les paroles sont en corrélation avec les actes, Puisqu’aucun bombardement de civils n’est à déplorer, aucune frappe massive non plus. Les principales cibles détruites étant des aéroports militaires et des points stratégiques de « l’armée ukrainienne », puisqu’on a vu qu’elle était largement soutenue à l’international. A partir du moment où la résistance se fait trop grande, les troupes Russes tempèrent, alors qu’encore une fois, elles pourraient opérer un tout droit dévastateur. Deux poids deux mesures, mais que dans un sens.
Dans cette optique et au lieu de faire des projections douteuses, il me semblerait important d’écouter les discours Russes et d’analyser leurs contenus ainsi que la situation qui en découle, avant de les discréditer d’office. La stratégie me paraît coller avec les dires. Cependant, une guerre est toujours déplorable et des civils innocents seront toujours au centre des balles, victimes collatérales d’un conflit dépassant largement les limites géographiques ukrainiennes.
« Au contraire de leurs adversaires, les forces ukrainiennes communiquent extrêmement bien et le président Zelensky est en quelques jours devenu une figure héroïque, louée dans le monde entier. Quelle que soit l’issue militaire du conflit, Poutine a déjà perdu la bataille de l’image. ». Le président Russe pouvait il gagner la bataille de l’image ? Cette observation me semble encore d’une facilité déconcertante tant l’archétype médiatique de Vladimir Poutine est assis et bien intégré. Pour faire court, un dictateur megalo et fou, qui dirige son pays d’une main de fer.
De l’autre côté nous avons Volodymyr Zelensky, ancien acteur et star de la télévision, qui a notamment remporté l’édition Ukrainienne de « danse avec les stars » et joué dans la série à grand succès « serviteur du peuple », dans laquelle il jouait un personnage politique intègre qui lutte contre la corruption (série qu’il a co-ecrit). Un statut qui a largement contribué à son ascension politique fulgurante (« serviteur du peuple » deviendra même un nom de parti). Son capital sympathie est donc au maximum. De plus, il est rodé au camera et au spectacle. Le duel me semble donc légèrement déséquilibré !
Au delà de cette joute entre deux personnages politiques, la guerre de l’information fait rage ! Nous assistons encore à un flot ininterrompu de propagande « pro Ukraine », une narrative 100% à charge et univoque.
Certain atténueront en disant que c’est propagande contre propagande et que c’est un juste retour des choses contre le pays qui, si il n’a pas inventé cette pratique, représente un de ses fers de lance historiques. « Poutine n’a que ce qu’il mérite » s’écrieront certain.
Cependant, Il me semble que si l’information se suffit à elle même, nul besoin de construire des preuves partisanes. De l’annonce de la mort d’un « journaliste » de CNN (un certain Bernie Gores) dont le décès avait déjà été annoncé en Afghanistan (avec la même photo), à l’utilisation d’images issues d’un jeux vidéo, en passant par le tournage de séquence de panique dans les rues de Kiev et l’utilisation d’une photo d’une femme mutilée datant d’une explosion d’une usine de 2015 … Les exemples ne manquent pas et les « professionnels » de l’information se sont encore rendus coupables de plusieurs malversations pour renforcer leur discours.
Sur les réseaux sociaux, il est très divertissant de voir que les mêmes profils qui appelaient à l’ostracisme des non vaccinés et justifiaient leur mort social, appellent aujourd’hui à la paix et sont des soutiens indéfectibles à l’Ukraine. Dans une vague (un raz-de-marée) désormais habituelle dans ce genre de situation, mais qui a été particulièrement rapide ici, on voit très rapidement fleurir des drapeaux bicolores sur les photos de profils, l’utilisation de citations pour la paix, l’indignation contre la guerre … Bref comme toujours on peut s’acheter une réputation d’humaniste et de résistant à moindre frais. Il faut d’ailleurs condamner, le plus rapidement et le plus fortement possible. Dans le cas inverse vous serez accusé de complicité. Ça m’a en tout cas permis de voir que les comptes sociaux des célébrités fonctionnaient bien, eux qui sont rester muets depuis 2 ans et demi, ont bien repris du service. Mais bon, encore une fois, il y a toujours le bien et le mal, ou plus simplement, l’humaniste et le complotiste. On connaissait les casques bleus, maintenant ce sont les cheveux bleus qui sont les soldats de la paix.
Je continue ce commentaire dans la même chronologie que l’article de référence, l’auteur évoque deux possibilités pour la suite du conflit. « Poutine sait qu’une défaite en Ukraine signifierait sans doute sa chute à Moscou ». Ce qui est possible, puisque une bonne partie de l’opinion Russe appelle à une intervention depuis plusieurs année, pour soutenir les provinces sécessionnistes (comme ça avait été le cas lors du conflit avec la Géorgie par exemple). Pour une nostalgie de la grandeur de l’empire soviétique ou pour simplement venir en aide à des populations victimes de l’armée ukrainiennes depuis 2014 et la promulgation par référendum populaire de leur statut sécessionniste ? Chaque camps choisira.
« La seconde possibilité, qui malheureusement semble plus vraisemblable, est qu’il s’entête quel qu’en soit le prix. Les combats pourraient encore durer des semaines et, pour en accélérer l’issue et donc diminuer l’impression d’une défaite russe, pour briser le moral de la population ukrainienne, il pourrait être tenté d’avoir recours à des frappes aériennes massives massacrant des dizaines de milliers de civils, comme les Russes ont montré qu’ils savaient le faire en Syrie. ». Ce paragraphe me semble encore extrêmement partisan et univoque ! Les Russes seraient donc les seuls à avoir des conflits en dehors de leurs frontières ?
Depuis la chute du mur et de l’URSS, la Russie est intervenue en Tchétchénie, au Tadjikistan pour combattre Al-Qaida, au Daghestan face aux salafistes, en Géorgie dans un schéma similaire à l’Ukraine, c’est à dire après une offensive éclaire de l’armée géorgienne contre les provinces sécessionnistes du nord (aujourd’hui la Russie reconnaît l’indépendance de ces régions et y maintient une puissance militaires à leurs frontières, sans pour autant envahir le reste du pays …) et en Syrie pour soutenir les forces de Bachar (une ligne qui peut se tenir tant la situation syrienne était complexe avec une flopée de forces en présences toutes aussi abjectes et illégitimes les unes que les autres) … Vladimir Poutine a toujours répondu à des attaques ou protégé les frontières directes de son pays et son peuple. Il n’a jamais reconnu le Kosovo qui est une enclave américaine (une de plus) et base militaire avancée (et sans qui le pays n’existerait pas). Ce qui est vu comme belliqueux par beaucoup.
Bref, je pense que de nombreux pays, surtout les USA, revêtissent beaucoup plus souvent le costume de gendarme du monde. MAIS c’est pour le bien ! Ce sont toujours des guerres humanistes, libératrices et salvatrices, j’oubliais cette notion … Là encore les USA et leurs alliés passeraient pour les sauveurs du peuples ukrainiens (après avoir mis le feu, en bon pompier pyromane). Les américains qui, au passage, pourraient gagner une bataille d’une guerre froide jamais terminée, mais plutôt mise en sommeil par la menace nucléaire de part et d’autre. Je pense que la volonté de faire basculer la guerre froide d’un côté, n’est pas uniquement Russe … Les USA sont beaucoup plus impérialistes dans leur manière de régner sur le monde, avec une stratégie de « soft power » bien plus dangereuse et sournoise. Plus besoin d’envoyer des troupes sur le terrain.
L’Ukraine à toujours été au centre de la relation Americano-Russe depuis la chute de l’URSS. Si il existe un lobby anti occident Russe, il existe aussi un lobby anti russe américain, né de la guerre froide et de la volonté de domination hégémonique du monde, dont l’OTAN est le bras armé.
Qu’est ce qui dans sa politique extérieure fait passer le président Russe pour un malade mental déraisonné ? Aujourd’hui rien ne prouve la validité de toutes les hypothèses qui sont évoquées ici et là. Déclarations de guerre générale, invasion des pays frontaliers ou encore missile nucléaire sur Paris (on peut tout entendre). Je pense qu’il y’a autant de folklore dans les discours politiques d’un côté comme de l’autre. N’importe quelle intervention de Vladimir Poutine est attendue comme la prise de parole d’un chef de guerre sanguinaire et tout est décrypté en vu des pires scénarios. « Poutine menace le monde », « Poutine sort la menace nucléaire » … Comme il l’a toujours fait, il protège les intérêts de sa nation et met en garde ceux qui veulent l’attaquer (qui sont menacés de fait au regard de la puissance dévastateur et sans pareil de l’arsenal Russe).
L’option de découpe du pays mise en avant dans l’article me semble peu probable, tant la partie de l’Est est beaucoup plus intéressante en terme économique. C’est elle qui maintient le pays. Je ne pense pas que les oligarques ukrainiens et les intérêts étrangers pharamineux présent dans le pays ne laissent faire ça …
Le reste de l’article n’est qu’une apologie de l’OTAN, une ode en sa faveur. Organisation que De Gaulle avait quitté en 1966 pour « recouvrer sur son territoire l’entier exercice de sa souveraineté » mais que la France a retrouvée récemment en 2007 sous Nicolas Sarkozy. Selon moi l’OTAN a toujours été dirigée par les États-Unis pour les Etats-Unis. C’est le fer de lance militaire de l’impérialisme américain jamais rassasié.
De plus, beaucoup de pays membre le sont par nécessité économique, politique ou militaire. La plupart des pays d’ex URSS souhaitant embrasser la démocratie libéral made in USA en font partie, comme pour trancher avec leur passé soviétique (ou juste parce qu’ils n’ont pas eu le choix après le démembrement de l’URSS …). Un souhait empreint d’idéalisme. Dans tous les cas, les Etats-Unis et leurs alliés s’en sont servit pour créer un mur uni aux portes de la Russie et donc faire peser une menace sur cette dernière.
C’est encore celui dont on ne doit pas prononcer le nom, un certain Donald T. qui voulait mettre un terme à cette alliance « obsolète et coûteuse ». Je ne pense pas qu’on puisse autant mettre l’organisation sur un piédestal, en garante de votre bien-être.
« Poutine peut se rassurer en se disant qu’il aura des relations avec la Chine, l’Iran, le Pakistan et quelques autres États qui sont indifférents au respect du droit international et des principes d’humanité ». Cette phrase teintée d’ironie hautaine, me semble tellement lunaire tant on a vu les pays « démocratiques » complètement bafouer le droit international et les principes d’humanité pendant la crise du Covid.
« Le scénario du pire » me semble tellement farfelu qu’il ne mérite pas de réaction. Pour rappel, la Russie est désormais la première puissance nucléaire et bénéficie donc d’une force de frappe tout simplement imparable et inédite (notamment grâce aux missiles dit « sarmat », surnommés satan à la puissance à peu près 1000 fois supérieure à la bombe d’Hiroshima). Aucun pays ne rentrera en guerre avec la certitude d’avoir perdu d’avance et d’aller à l’encontre d’une déconvenue, potentiellement dévastatrice, prévue et prévisible. Comme aucune sanction n’effraiera Poutine … La puissance économique Russe, tant en acheteur qu’en vendeur, est beaucoup trop grande. Pour l’anecdote, Mattéo Draghi s’est déjà assuré que les marques de luxe italiennes pourraient toujours vendre sur le marché Russe.
Voilà mon avis à ce moment M, qui est bien sûr sujet à évoluer … Je ne suis pas un soutient indéfectible Russe et je ne suis pas politisé, je refuse tout simplement de recracher le discours manichéen pré-mâché que l’on me donne.